La pêche à la ligne est une activité pleine d'imprévus. Quoique puisse véhiculer depuis des lustres l'imagerie d'Epinal du pêcheur assoupi à l'ombre d'un saule complice, fixant d'un oeil mi-clos un flotteur gros comme un navet transgénique primé au Salon de l'Agriculture intensive restant immobile depuis une éternité, il faut garder à l'esprit que celui-ci peut se révéler à l'occasion dynamique, réactif, pas du tout légumier dans l'esprit. Je parle bien évidemment du pêcheur. Certains chevaliers de la gaule, à l'instar de métazoaires du Cambrien conquérants, refusant la triste logique de l'assistanat, savent en effet (et c'est heureux) dans l'adversité se révéler au monde comme forces de proposition...
Mais le pêcheur à la ligne ne se contente pas lorsqu'il déchaîne ses potentialités démiurgiques de tourner habilement la réglementation liberticide en vigueur. Il est aussi un fin observateur du milieu aquatique, un zoologiste averti et un ami de la Nature avec des idées bien arrêtées sur la gestion des populations piscicoles. Il ne s'arrête pas dans la sinistre vasière aux idées reçues ni ne s'abîme dans le colportage de ragots déplorables. Non, pas de ça chez nous. Ce n'est pas le genre de la maison.
Mieux, il est souvent un oracle malheureusement ignoré tel une pauvre Cassandre en cuissarde. Pressentant l'arrivée des malheurs, du poisson-chat au cormoran, du hotu au quota journalier de captures, il a de tous temps su couiner aux vieilles lunes que demain serait un champ de ruines. Déjà, le croirez vous, le pêcheur français alertait sur les dangers du "Saume", un vorace destructeur, grand amateur de charognes (jusqu'à ce qu'il finisse par s'éduquer gustativement parlant et se mettre à préférer les caniches abricot d'après la rumeur publique) alors que Philippe Pétain n'était que colonel.
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