Retour aux fondamentaux

Parfois, lorsque l'on atteint l'air raréfié des sommets, on a oublié en chemin combien peut s'avérer noble la pratique ancestrale de cette bonne vieille pêche au coup fleurant bon l'asticot mariné dans l'urée, la farine vérolée et l'eau croupie dans laquelle batifolent innocemment des rongeurs immigrés scatophages. On a beau être considéré par la plèbe énamourée comme le Nadal du skipping, le Teddy Riner du pitching-in-the-cover ou le Darry Cowl du steady retrieve, notre succès ne serait pas ce triomphe légendaire sans que nous osions, de temps à autres, remettre en jeu notre réputation sans tâche en revenant aux racines de notre art...

Quel défi à notre mesure que d'affronter les eaux putrides du recueil d'eaux pluviales d'à côté, ne trouvez vous pas ? Il fallait bien consoler Tac privé provisoirement de son Tic invité au bowling et marchant allègrement sur les traces de Richard Nixon voire du Big Lebowski. Sans compter que cela fournit un bon prétexte pour solder mon ultime paquet d'amorce "Gros Gardons",  le seul que ces saloperies de rongeurs ont épargné dans la cabane à jardin. Mon jeune disciple, Tac, a su profiter de cette aide précieuse en alignant les gardons avec une régularité de stakhanoviste du ferrage à la touche. Puis ce sont les aspirateurs à amorce (accessoirement surnommés fouille-vasouille) qui se sont pointés...

Tac, émerveillé, a découvert les carassins, ces joyeux compagnons d'une après-midi ensoleillée. Quoi de plus attrayant en effet que ces gros goinfres toujours en quête d'un petit en-cas ? Entre nous, vu la météo qui semble se profiler pour les prochaines semaines, ce n'est pas inutile d'avoir un point de chute pour choper du vif à silure... Je sais, ça fait frémir mais je me sens étonnement disruptif sur mes vieux jours.

Tac en tout cas n'a pas boudé son plaisir. Seul l'oubli fâcheux de l'épuisette a jeté une ombre au tableau en permettant à deux spécimens particulièrement vitaminés d'exploser le bas de ligne arachnéen de l'infortuné jouvenceau. Mais vous pouvez remballer la cellule d'aide psychologique, ce rude forban est un battant. Je suis certain qu'il est d'ores et déjà partant pour repartir à l'assaut de la bassine...

Il est à l'heure actuelle parfaitement impossible de tempérer son enthousiasme tant le juvénile pétarade à la simple évocation d'une nouvelle escapade sur ce lagon artificiel eutrophisé, certes cerné par les fientes de volatiles diarrhéiques mais peuplé d'une bonne grosse masse de poiscailles affamés.