dimanche 5 août 2018

Summertime blues

Plus les années passent et plus je me renforce en ma sordide condition d'acariâtre acarien réfractaire aux transhumances automobiles de masse. Passer 8 heures à thermostat 10 dans ma bagnole pour faire 500 bornes tout en m'acquittant d'une somme somptuaire à chaque péage, pour au final m'emmerder comme un rat mort, les volets tirés, une semaine dans un pucier loué l'équivalent de 3 mois de loyer ou, pire, suffoquer sous la tente entre une colonie de Hollandais alcooliques et un groupe d'adolescents sociopathes exfiltrés temporairement de leur Z.E.P à la demande pressante de la B.A.C locale soucieuse d'échapper à la dépression nerveuse et confié au contrôle lointain d'éducateurs gagnés peu à peu par la tentation du suicide, non, finalement très peu pour moi, merci… Je n'ai pas besoin de bouffer du kilomètre, du sable et des fruits de mer à la fraîcheur relative pour me donner la fragile impression d'avoir réussi ma vie de consommateur… 
Nouvel arrivage d'Area Spin "maison"... 
De toute façon, par ces temps de canicule, qu'on reste piteusement calfeutré chez soi, prolétaire navrant ruisselant en slip à côté du ventilateur, ou qu'on baguenaude, décontracté du mocassin Gucci, pull Lacoste négligemment noué au dessus de son polo Ralph Lauren en jouant ostensiblement avec les clés de son Audi RS3, dans les rues commerçantes d'un quelconque lieu de villégiature interdit aux allocataires du RSA, on se déshydrate tout pareillement. Le réchauffement planétaire, au moins, c'est l'égalité au niveau du calorifique. Que vous soyez puissants ou misérables, vous habitez tous la même planète, bande de cons.
Les petits black-bass sont généralement assez compréhensifs quand on est contraint et forcé de pêcher en plein après-midi caniculaire. Par contre, ce sont des poissons et donc, à un moment, ils ont quand même besoin d'eau pour survivre...
Bref, sur ces considérations puissantes qui, j'en suis certain, révolutionneront l'enseignement de la philosophie en bousculant les habitudes comme l'ont fait en leur temps Spinoza, Nietzsche ou Pascal Praud, revenons-en à mes tribulations estivales. Un petit peu de misérabilisme, ça ne fait jamais de mal^^. Après plus d'une semaine sans pêche, j'ai ressorti les gaules malgré un cagnard de plomb. J'ai été rapidement récompensé par la découverte d'un petit leurre aliexpress tout neuf oublié sur la berge et qui plus est d'un modèle dont j'avais envisagé l'achat cet hiver. Cette heureuse trouvaille va donc grossir ma pléthorique collection. Youpi.

Les cuillères "vintage" prennent encore et toujours malgré la baisse drastique des niveaux d'eau et la chaleur ambiante...
Bénéficiant en tout et pour tout de deux heures de libre en plein après-midi, c'est peu dire que je n'attends rien d'exceptionnel de la sortie. Si je réussis à éviter la bredouille et/ou l'insolation, je pourrais m'estimer chanceux. Hélas, arrivé sur le lieu que je comptais explorer, je me retrouve rejoint dans les cinq minutes par Mister "White" Booba et un comparse désespérément moins "haut en couleur". Torse poil, biscotos travaillés en salle et casquette réglementaire de la dalle d'Argenteuil, le monsieur ignorant superbement mon timide salut se met à bombarder le filet d'eau coulant en contre-bas avec un leurre à brochet de plus de cent grammes aussi avant-gardiste chromatiquement parlant qu'une baraque à frite mexicaine tenue par un daltonien… Devant l'incontestable révélation que j'ai affaire à un intellectuel capable de traquer l'ésocidé métré dans 30 centimètres d'eau croupie au soleil, je préfère me retirer avec dignité avant de me sentir obligé d'exploser de rire… Ce qui, vous en conviendrez, est diplomatiquement discutable quand on se trouve à moins de deux mètres d'un abruti bodybuildé potentiellement susceptible…

Me transportant subséquemment sur un spot de secours quasiment perdu dans les tréfonds douteux de ma savane inhospitalière, j'ai la douloureuse surprise de tomber sur une troupe de joyeux branleurs, en pleine montée de produits psychotropes, fort occupés à vandaliser en faisant preuve d'une belle énergie les aménagements effectués pour assurer la continuité des milieux aquatiques par temps d'étiage par la société de pêche locale. Super. Face à une dizaine d'énergumènes défoncés, dopés par un subtil mélange d'hormones en ébullition, de 8°6 chauffée au soleil et de quelques gros pétards de drogue, je n'obtiens pour réponse à mes interrogations quant à leurs intentions de restructuration spontanée du lit de la rivière qu'un doigt d'honneur discret. Fichtre. Les vils coquins. Cela ne restera point impuni. Hésitant  in petto à déclencher un pugilat à 1 contre 10, je dois me résoudre à en référer à qui de droit. Une heure plus tard, après avoir exposés les faits à la maréchaussée territorialement compétente, je peux enfin entamer ma partie de pêche… Il me reste trois quarts d'heure. Cool.


Et là, récompensé sans aucun doute par le Dieu des Délateurs entre deux âges, je me mets à prendre du poisson. Rien de bien glorieux mais je ne boude pas mon plaisir ; quelques perches avec un Area Spin maison, des kiki-bass au LS et surtout le baptême du petit leurre trouvé par terre et qui, malgré (ou à cause ?) des billes bruyantes  qu'il héberge, a fait bouger des perches qui, par une chaleur pareille, avaient toutes les bonnes raisons du monde, pour rester amorphes. Profitons-en car il y a fort à parier que dans une à deux semaines, tous ces petits poissons auront fait la joie des hérons, des rats et des écrevisses…  





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