jeudi 26 juillet 2018

Pin's de canicule au crépuscule


Il y a toujours un moment où on se pose la question qui tue : est-ce vraiment une idée absolument géniale, au terme d'une journée épuisante passée dans l'équivalent urbain d'un autocuiseur, que d'aller baguenauder en waders au hasard des berges d'un fleuve à l'eau encore bien chargée pour la saison ? Malheureusement, j'en parle en toute connaissance, la réponse que nous apportons à cette légitime interrogation s'avère parfois fâcheusement  influencée par un besoin impérieux de prendre l'air en profitant de nos trop rares moments de liberté, sans mésestimer pour autant l'abrutissement dans lequel nous confine l'accablante chaleur ambiante qui obère par son intensité  la pertinence de notre jugement…

C'est l'engrenage fatal qui nous entraîne à nous retrouver en début de soirée face à (au choix) une horde de crétins en paddle hurlant à gorge déployée en s'aspergeant d'une eau composée d'une part non négligeable d'urine de gros rongeurs potentiellement porteurs de la leptospirose, de dizaines de familles de prolétaires défiant l'autorité et les panneaux "Baignade interdite" en trempant joyeusement leurs miches hypertrophiées par l'abus de Nutella en lisière de courants n'attendant qu'un instant pour emmener un de ces Bidubules visiter le Gulf Stream, voire à des propriétaires de bateau de plaisance jouant au tsunami dès qu'ils repèrent un couillon porteur de canne à pêche progressant avec peine dans la brousse rivulaire. Là, on jure un peu tard que l'on ne nous y reprendra plus...

Malgré tout,  on est bien obligé de serrer les dents et de tenter de pêcher quelques poissons afin de ne pas épuiser définitivement son crédit d'amour-propre. Bien évidemment, comme à chaque fois que j'ai pêché en soirée, les moustiques sont en appétit, ça fait plaisir cette exubérante biodiversité… En cherchant à sortir des sentiers battus, j'ai réussi avec brio à chuter dans les hautes herbes grâce à une pierre branlante dont le mouvement a aussitôt révélé la présence d'une colonie de frelons asiatiques goûtant assez peu le dérangement… L'aventure, c'est l'aventure.
Entre gamelles sordides, croisement industriel de ploucs pollueurs et agressions en réunion d'insectes versés dans l'ultra-violence, il devient difficile, y compris à notre d'ordinaire si conciliant regard envers nos propres turpitudes, de continuer à  considérer que, pratiquée dans ces conditions, la pêche à la ligne reste un loisir et ne s'est pas muée en chemin en une activité à mi-chemin entre le bondage et le survivalisme...
Tout ça pour péniblement prendre quelques pin's au milieu d'une activité nulle. Aucune chasse en vue. Pleine lune en train de monter. Bordel… Quand la pêche devient aussi palpitante qu'une émission de LCP sponsorisée par Lexomil, on ferait mieux de rester au frais…


Vu que je suis un acharné, j'ai poussé le vice jusqu'à tenir jusqu'à l'expiration de l'heure légale. Pour au final pas grand chose de mieux à me mettre sous la canne vu le marasme ambiant. Il va être temps de faire un petit break et de laisser passer cette canicule… Après tout, le feuilleton de l'été semble être pour une fois tout à fait passionnant et laisse présager de superbes rebondissements dont je savoure par anticipations les divins soubresauts.




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