Alors que je dispose ces derniers jours de quasiment toutes mes après-midi pour aller à la pêche, le temps est déplorable. Ciel gris, vent froid, bref, cela n'éveille en moi aucun désir brûlant pour la traque de l'alevin en milieu hostile. L'éventualité de dépenser du carburant pour me les geler afin de galérer une paire d'heures pour prendre quelques percidés anorexiques, franchement, ça ne vend pas du rêve. Mais plutôt que de fléchir mes genoux cagneux sous le joug de l'infamie ou de courber l'échine face à ce destin implacable, j'ai su garder ma dignité en m'attaquant au recyclage des cuillères !!! Car vous n'êtes pas sans l'ignorer, je suis un frénétique récupérateur de ferraille suspendue dans les airs par des pêcheurs emportés par l'exaltation et faisant fi de toute prudence ainsi que des principes de base de la balistique.
Périodiquement, je me penche sur le stock entassé et, bravant gaillardement le tétanos, j'en bricole, leur donnant une seconde vie. En ce moment, à un mois du retour à une activité halieutique digne de ce nom s'entend, c'est ma principale occupation en dehors de mes efforts désespérés pour rester digne et propre par l'entremise d'une activité salariée de bas étage. J'ai toujours mon stock de lombrics mais, entre nous, l'idée d'aller pêcher au posé avec me révulse tant je sais que je vais m'ennuyer en restant le postérieur calé sur un caillou, à répondre d'une voix morne aux sempiternels "alors ça mord ?" ou "y a plus rien, j'ai tout pris" que les passants se sentiront obligés de m'adresser en guise de tentative faussement joviale d'interaction sociale totalement superfétatoire. Du moins en ce qui me concerne.
Mais il va bien falloir que je les utilise, morbleu, ces petits vers. Bon, laissons ça de côté, je leur trouverai bien un usage. Je me connais à force, il est probable que je trouve une heure ou deux pour aller jouer du drop-shot lombric dans des contrées méridionales relativement proches, même si mon plan float-tube a fait pschiiiiit vu que le spot que je comptais pêcher est en réserve temporaire jusque fin mai, damned.
En attendant de me décider à retourner harceler de pauvres poissons innocents, je continue donc tant bien que mal à recycler mes petites cuillères, les agrémentant avec coquetterie de poils et de plumes du plus bel effet. Les quatre semaines qui s'annoncent risquent fort d'être industrieuses tant il me reste à faire au niveau tri et rangement. D'autant plus si, au lieu de trier et de ranger, je produis des leurres supplémentaires en série. On s'en sort plus à ce tarif.
Autant vous le confesser, j'ai commis un acte effroyable, enfin un de plus quoi : j'ai commandé sur aliexpress de quoi monter encore quelques cuillères. Voire d'autres microspinnerbaits. C'est dire si la fermeture m'a fait basculer dans une maniaquerie productiviste ayant quitté depuis longtemps les austères rivages de la lucidité pour l'océan déchaîné de la créativité sans filet. Je sais, je sais, je sais. Je n'ai pas pris ma quétiapine.
Tout ça pour dire que ça commence à être foutrement long cette fermeture. Poil à Balladur.
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