Le retour surprise des algues

Parfois, il est bon de faire confiance à cette sourde intuition qui vous susurre dès l'aube qu'il ne serait pas inopportun de consacrer son dimanche au repos (voire au rangement du coin pêche !!!) en lieu et place de partir au petit bonheur sur les éboulis instables bordant la Loire. Mais je ne suis pas ce genre de timoré.

Je crains même d'incarner le funambuliste écervelé prêt à faire 50 kilomètres avant de se rendre compte que la Loire est salement montée en 48 heures et qu'inexorablement une nouvelle vague dantesque d'algues dégueulasses s'accumule en surface dans les calmes et tourbillonne dans les contre-courants en compliquant plutôt sérieusement la pratique de la pêche. Pire ! Le coin où je voulais commencer mon périple n'est plus accessible sans prendre de gros risques et en jouant les équilibristes forcenés. Je finis pourtant par y ferrer un poisson.  Un énorme chevesne. Oh non. Il me faut le ramener au milieu des herbiers denses en bordure alors que je vois que mon AR-S est juste piquée au coin de sa gueule avec deux branches dehors !!!  Évidemment ce qui devait arriver arrive. La bête se décroche en me poussant à lâcher un hurlement discret mesuré à 146 décibels.

Gravement atteint dans ma dignité déjà flageolante, j'entame alors un long moment de moins bien. Soit en variations corrigées des données saisonnières, environ cinq heures sans la moindre touche mais en ne passant pas très loin de déclencher la fureur homicide d'un essaim de frelons asiatiques sournoisement dissimulé dans des arbres morts. Disons-le sans ambage : en ce milieu d'après midi, ça sent très fort la bredouille.

Heureusement, je finis par prendre une bonne décision. Comme quoi, tout arrive. Je m'arrête donc sur un spot archi-fréquenté mais où je pense qu'éventuellement, on ne sait jamais, quelques poissons blancs peuvent prendre le soleil en guettant d'un oeil torve l'alevin désorienté. C'est là que, sans excessive gloriole, je sauve la bredouille grâce à mes AR-S et à quelques pin's inconscients.