jeudi 25 octobre 2018

Padawâneries à tous les étages

Sale temps pour les écureuils. Les vacance de la Toussaint reviennent et l'équipée sauvage aussi. C'est l'heure du stage de découverte de la pêche des carnassiers pour la joyeuse bande de pré-ados prête à transformer les saules pleureurs en sapins de Noel avant l'heure, à parsemer le fond de la Sèvre d'un attirail de leurres souples tous neufs, bref de mettre à l'épreuve l'équanimité de ses encadrants pourtant rompus à ce genre d'épreuves...
La sortie-pêche avec les jeunes : un moment de méditation transcendantale proche du zen ultime...
Les débuts de la fiesta furent prometteurs en diable : les perches répondent présentes et un brochet maousse manque de très peu de tester la résistance de mon 18/100° en attaquant un petit grub aliexpress sur TP Palette qui ne lui était pas du tout du tout du tout destiné. Tout semble donc réuni pour une session d'anthologie. Sauf qu'un petit détail grippe la machine dès l'aube du premier jour. Mon joyeux padawan n'a rien trouvé de mieux que d'oublier canne et moulinet flambant neufs sur la berge de la rivière où nous avions rapidement pêché la veille… 25 kilomètres aller-retour plus tard, le Dieu des Distraits est avec nous. Personne n'a ramassé le combo abandonné à quelques mètres du parking par le négligeant jeune homme. Un véritable petit miracle...
Une perche prise à vue dans deux mètres d'eau avec une larve de libellule aliexpress.
Comme s'il fallait aux Dieux compenser ce bienfait par une malédiction, la journée a été éprouvante. Un froid de canard congelé le matin  à peine égayé par quelques touchettes de micro-perchounettes n'a pas franchement aidé à faire monter l'enthousiasme dans les rangs de la jeune garde. Le pique-nique du midi expédié, un soleil timide commence à monter, on se dit imprudemment que le sort tourne en notre faveur. Et non, le vent se lève. Et quel vent. Un bien mordant venu du septentrion et pas avare de la rafale qui couche les branches, fait lever les vagues et pousse les leurres en haut des arbres. Aaaargh… Heureusement qu'au milieu du désastre, un petit brochet me sauve du déshonneur. Grâce à une monture "donzette" des stocks stratégiques du Maillochistan, ce poisson sort de l'herbier autour duquel tous les padawans avaient pataté pendant deux heures moult et moult leurres. Comme quoi, parfois, c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes...

Un pétulant pré-ado vient de découvrir les avantages du do-nothing millimétré pour bass difficiles par rapport au bobinage stakhanoviste primaire de leurres durs.
Le second jour débute comme le premier par un froid mordant et des juvéniles maladroits incapables d'éviter les tiges de nénuphars pourtant mal portants. Heureusement contrairement à la veille, le pique-nique de midi se déroule au soleil et les bass se réveillent, redonnant de la tonicité à la bande de joyeux drilles. Les prises s'enchaînent, les décrochages aussi. Comme quoi, on ne peut que se féliciter de l'existence de ce poisson glouton qui évite si souvent la bredouille aux enthousiastes mais encore brouillons apprentis.

Finalement, le seul ennemi d'une pêche automnale réussie (à part la grosse caillante et le vent sibérien soufflant à décorner tous les zébus de Madagascar évidemment) est parfaitement identifié. Il s'agit du sinistre téléphone portable avec connection internet. Une plaie caractérisée que cette addiction affreuse. La peste soit de ce gadget mortifère dont les misérables victimes minorent avec une pathétique candeur l'influence désastreuse sur leurs résultats halieutiques. Pourtant, quand on a le museau collé sur l'écran tout l'après-midi, il n'est pas vraiment surprenant qu'on prenne moins de poissons que les autres, jeune homme...

 Comment avec un seul poisson, une cuillère ondulante qui est pour les moins de 20 ans, rappelons-le,
"ce leurre de vieux tout pourri qui prend rien" réchauffe le cœur du Petit Scarabée…

A l'issue d'une deuxième journée féconde en prises, il était donc temps de prendre des décisions fortes. Au matin de la troisième et ultime journée de l'épopée, la consigne est claire: il n'y aura pas de portables au bord de l'eau. Aujourd'hui, c'est Lucky craft, pas Minecraft. Et là, paf, par enchantement, tout le monde prend du poisson dès le matin. Comme quoi, les leurres dans l'eau prendront toujours plus que ceux qui restent au sec, accrochés aux cannes, pendant que leurs propriétaires s'esbaudissent de vidéos mettant en scène des singes lanceurs de caca ou d'otaries en pétard tentant de tuer des kayakistes à coups de poulpe…

Bien sûr, tout ne fut pas parfait. Quelques leurres ne regagneront jamais le douillet confort de ma boîte Plano "spécial Crash-Test". D'autres, si, mais dans un état proche de l'Ohio comme dit le poète. Il m'a aussi fallu shampouiner d'autorité aux myriophylles un pétulant stagiaire qui avait découvert le formidable potentiel que possèdent ces plantes invasives (facilement récoltables au leurre souple traîné au fond soit dit en passant) comme projectiles destinés à ses petits camarades. La propagande par le fait, il n'y a que ça de vrai...
Pas faciles-faciles, les poissons du secteur no-kill… Mais au moins, là, il en reste.
Au grand soleil de l'après-midi, nous avons eu la chance de finir le stage en T-shirt sans que cela ait quoi que ce soit à voir avec le réchauffement climatique qui n'est qu'une invention perfide des écologistes soviétiques travestis agnostiques démocrates sociaux d'après certains experts autorisés par Total, Exxon et l'Amicale des tortionnaires méritants présidée par le capitaine Bolsonaro… Encore du bass au compteur pour la horde des trublions rivulaires… Mais pas aussi gros que certains l'espéraient, hélas.
C'est souvent à l'issue de ces stages en immersion que les jeunes découvrent les subtilités
de communication en vigueur au sein de la branche d'activité...
Le lendemain matin, sur le chemin du retour dans nos pénates, le Padawan & moi nous sommes arrêtés sur un petit parcours bien fréquenté et classé en no-kill. La pêche n'y a pas été très facile mais nous avons quand même pris quelques poissons "pour la route"... Histoire de nous consoler d'avoir à quitter ce petit coin de verdure pour regagner la grande ville, ses embouteillages et ses environs grisâtres parfumés au metam-sodium. Le temps passe toujours trop vite au bord de l'eau. Snif...


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